Au revoir chère carrière policière !
Maintenant que mon projet de chien de soutien a fait plusieurs petits, je te quitte.
Je t’écris donc cette lettre d’au revoir en espérant faire la paix avec notre séparation hâtive. Nous avons passé 21 belles années ensemble et comme tous vieux couples, nous avons eu nos hauts et nos bas.
Nos premières années sur la patrouille, c’était le coup de foudre pour moi. Je voulais toujours être avec toi et cette lune de miel a durée quelques années, mais tranquillement, la routine s’est installée entre nous. Comme un vieux couple, il n’y avait plus de feux d’artifice, mais on est heureux pareil.
Merci pour ces belles années, chère carrière, c’était un plaisir d’aider les gens avec toi jusqu’à ce que la désillusion me frappe de plein fouet au visage! On appelle ça un voie de fait agent! Mais pas de souci pour toi, la sentence pour un crime comme ça n’est jamais ben ben sévère…
La désillusion, c’est quand on réalise que finalement, on ne peut pas aider quelqu’un qui ne veut pas s’aider. Qu’on fait partie d’un gros système où notre travail acharné ne donne pas grand-chose au final à part de financer le gros système…
Même si je ne te voyais plus comme avant, je t’aimais pareil. Je vivais d’espoir qu’un jour on fasse notre différence.
Et puis, tu as changé aussi avec les années et pas pour le mieux je vais te dire… du moins pas aux yeux d’une minorité bruyante qui tente de nous fait croire que leur opinion est généralisée. C’est décourageant.
On malmène ta réputation et ton image. Ah, cette sapristi image où l’on doit toujours être et paraître parfait. Je ne suis plus capable de ça chère carrière. Je suis imparfaite, je fais des erreurs, comme tout le monde quoi, mais j’ai toujours été bien intentionnée. Vas-tu l’accepter un jour qu’on est juste des humains?
Tu es jugée, méprisée et surtout mal comprise. Et ces brutes qui manifestent contre la brutalité policière? Je n’ai jamais compris qu’on puisse demander à ce que la violence cesse en étant violent…
Les deux fois que la cigogne est passée me voir, je t’avoue que je n’étais pas malheureuse de m’éloigner de toi quelque temps. Tu es toujours si négative, tu m’envoyais là où les gens sont rarement heureux de me voir. Tu es une vraie «Drama Queen» et c’était lourd à la longue sur le moral.
À mon retour dans tes bras pas trop accueillants, j’ai cru qu’il serait plus sage de devenir enquêteur pour avoir un horaire plus stable pour la vie familiale et pour ne plus passer de nuits blanches avec toi. Tu étais devenue plate la nuit de toute façon, maintenant que les crimes informatiques ont gagné du terrain. Alors, c’est pour ça que j’étais prête pour un autre défi. Erreur…
Je ne suis pas psychiatre, mais je crois que tu as une double personnalité. Sur la patrouille, tu étais dans le feu de l’action, tu étais plus physique. J’aimais l’adrénaline que tu me procurais, une sorte de drogue légale. Mais aux enquêtes, tu es vraiment une intellectuelle. Tout autant dans l’action, mais là on carbure sur le cortisol, l’hormone du stress et de l’anxiété!!! Pas pour rien qu’on y tombe comme des mouches aux enquêtes!
Et quand tu ne comprends pas qu’on a besoin d’aide et de ressources, qu’on n’est pas bien et que tu réponds qu’on devrait être heureux parce qu’on ne fait plus de nuit et qu’on a le cellulaire fourni… on part de très loin si on espère un peu de ton soutien…
Après plusieurs années aux enquêtes, la routine s’était encore installée entre nous. Après 17 ans de vie commune, il fallait trouver quelque chose pour revigorer notre flamme. J’ai été inspiré et c’est là que nous avons vécu notre deuxième lune miel.
C’est là que je suis arrivée avec le projet des chiens de soutien émotionnel pour les petites victimes. Les deux premières années ont été merveilleuses et tout un trip à trois avec ce cher Kanak! Un amour de chien qui a fait beaucoup de bien auprès des enfants agressées.
C’est dans la troisième année de ce projet que tout a commencé à dégringoler. Tu avais encore changé et notre relation commençait à battre de l’aile. Tu devenais de plus en plus exigeante tout d’un coup et tu ne nous offrais pas plus de ressources. Mes collègues et moi étions toujours à courir à la vitesse d’un sprint pour un marathon sans fin… Pas le temps de dîner, pas le temps de respirer, pas le temps de penser. Plus ça allait, plus tu m’épuisais.
Moi qui suis toujours calme, j’étais devenue anxieuse, impatiente, irritable, émotive. Même si j’adorais mon travail avec Kanak, force est d’admettre que d’entendre des histoires d’horreur à tous les jours ou presque a eu le dessus sur moi. J’étais stressée et mon corps pour se défendre à développé un stress post trauma. En passant, c’est assez ordinaire de ta part chère carrière de contester ce diagnostic, on va donc se revoir en cour…
Tu sais, ma force qu’est l’écoute et l’empathie était devenue ma faiblesse. La souffrance humaine m’a marquée au fer rouge. Après 21 ans ensemble, tu as su heureusement garder ma veste pare-balles intacte, mais ma veste pare-émotions elle, est usée à la corde sans pouvoir être raccommodée.
J’ai voulu faire des ajustements avec toi pour me sauver d’un naufrage, mais tu n’as pas voulu. Tu ne jures que sur ta bible qui s’appelle La Convention Collective. Traiter tout le monde pareil, sans égard à nos différences, nos besoins ou nos difficultés est ta philosophie. L’égalité, mais pas d’équité. Des vieux principes qui nivellent par le bas, pas pour moi!
En passant, tu m’as beaucoup fâchée quand tu m’as dit que je ne devais pas en faire autant pour mon projet, pour ma carrière, pour les victimes, car le boss allait s’attendre à ce que les autres fassent comme moi et il ne fallait surtout pas élever les standards… Tu ne voulais pas que je bâtisse une superbe communauté sur Facebook autour des chiens de soutien parce que je n’étais pas payée pour le faire. C’était ma passion, c’était mon loisir personnel, c’était ma source de reconnaissance, c’était ma fierté. Que j’ai eu mal quand tu as déposé tes griefs sans mon consentement, tu m’as fait perdre Kanak, sa page et ses 12 000 fans.
Chère carrière policière, je me suis battue pour me réconcilier avec toi, j’ai tenté de revenir, mais quand je pense à toi, j’ai encore le dégoût de tout. Je t’avais tout donné, mon temps, ma santé, ma loyauté et il ne me reste plus rien à te donner maintenant.
J’ai apporté de l’humanité au gros système avec mon chien, mais quand moi j’ai eu besoin d’aide et d’humanité, tu m’as laissé tomber. Du jour au lendemain, tes gros bravos pour toute la visibilité et les prix d’excellence que j’apportais au gros système, sont devenus silence radio quand je suis tombée malade. Pas de ton soutien, pas d’appel, pas rien.
Je ne veux plus vendre mon précieux temps ainsi que ma santé physique et mentale au gros système pour 100 000$ par année. Aider oui, mais pas à n’importe quel prix ! Notre relation est devenue toxique et je suis allée voir ailleurs si je pouvais trouver mieux que toi. Eh ben oui! Pour être honnête, une autre carrière me fait de l’œil et je demande donc le divorce officiellement. Je me libère de la prison dorée que tu es devenue.
Le problème chère carrière policière, c’est que je m’inquiète pour mes collègues. J’en ai vu beaucoup qui sont désabusés, stressés, qui vendent leur santé pour rester avec toi ou tout simplement qu’ils ne t’aiment plus mais reste pour la sécurité que tu leur apportes.
Dis-leur de prendre soins d’eux, vraiment. Ce n’est pas le gros système qui va le faire pour eux et s’ils ont besoin d’aide, s’ils se sentent perdus, dis-leur, je t’en prie, d’aller chercher de l’aide. Il n’y a aucune honte à le faire. C’est important qu’ils en parlent et qu’ils s’occupent d’eux, car c’est comme ça qu’on peut s’en sortir!
Bye carrière policière, toi et moi c’est fini. Je ne regrette rien, mais il est temps pour moi de passer à autre chose.
Je te quitte pour devenir coach professionnelle spécialisée en neurosciences et pour aider les collègues qui ne sont plus bien avec toi. Je veux les aider à retrouver un sens à leur vie, à se relever plus fort après une dépression et à retrouver un sentiment de bien-être avec ou sans toi. Si ça te tente, tu peux me suivre à ma nouvelle adresse https://melaniebedard.ca/ ou sur ma page : https://www.facebook.com/webamiemelanie/
Pour toi, j’étais matricule 1189.
Pour les autres, je suis Mélanie et je suis très heureuse sans toi !